Infirmière au Dispositif d’annonce en cancérologie, je prends en charge des patients atteints de cancer en phase débutante de la maladie, après l’annonce médicale du diagnostic de cancer, et avant l’entrée thérapeutique, ou bien des patients qui ont déjà bénéficié de l’intervention chirurgicale et nécessitant des traitements complémentaires.
Ils témoignent de leur vécu de la maladie, de leurs peurs, angoisses, anxiétés liées à l’incertitude de leur avenir, de l’appréhension des traitements et de leurs effets secondaires.
La maladie fait une intrusion violente dans leur vie, les repères sont bousculées ; leur identité individuelle, leur statut social, professionnel et leur rôle familial sont ébranlés. La maladie vient déstabiliser leur quotidien, modifier leurs habitudes et provoquer des pertes et des changements.
Ils nous confient que la maladie, les traitements (chirurgie, chimiothérapie, hormonothérapie) et leurs séquelles, la douleur, la fatigue, les modifications physiques (perte de poids, prise de poids, amputations, cicatrices…) viennent perturber l’image de leur corps et la force de leur confiance en eux.
Ils évoquent le traumatisme psychologique ; ils décrivent leur corps balafré de stigmates visibles ou non (alopécie, mammectomie, hystérectomie, prostatectomie, trachéotomie, colostomie, sondes) avec leur corollaires d’odeurs, de plaies et d’écoulements qui bouleversent leur intimité.
Comment dire et montrer ce corps à son/sa partenaire ?
Comment vivre son regard ?
Comment recevoir la surprise de l’autre ?
Le temps d’accompagnement est un temps fort en expression. On y échange des émotions, des informations concrètes, des histoires de soi, des histoires de vie et de famille. Pour le patient, l’enjeu est de mettre du sens dans ce chaos. C’est un temps où l’infirmière et le patient inventent des chemins à travers l’écoute, la parole, le soutien et la confiance.
Leurs questions :
Concrètement, comment vivre le plus normalement possible quand « c’est plus comme avant » ?
Comment parler de sexualité alors que le cancer projette l’ombre de l’incertitude et de la mort ?
Comment parler de la sexualité alors que c’est souvent un sujet intouchable et tabou et qu’il relie à la honte, la pudeur, la timidité, l’éducation, la religion, la culture ? Tout est à prendre en compte.
Comment parler de la sexualité, les rivages les plus intimes de soi alors que c’est déjà si difficile de parler de son quotidien ?
Comment se reconnaître dans son corps quand il est méconnaissable ?
Comment laisser l’autre toucher sa peau lorsque sa propre main répugne à effleurer ?
Comment éprouver du plaisir lorsque son corps n’est que douleur ?
C’est à nous les infirmières, par notre attitude d’ouverture, de faciliter la parole mais aussi d’accueillir la gêne et le silence.
Ils témoignent de leur vécu de la maladie, de leurs peurs, angoisses, anxiétés liées à l’incertitude de leur avenir, de l’appréhension des traitements et de leurs effets secondaires.
La maladie fait une intrusion violente dans leur vie, les repères sont bousculées ; leur identité individuelle, leur statut social, professionnel et leur rôle familial sont ébranlés. La maladie vient déstabiliser leur quotidien, modifier leurs habitudes et provoquer des pertes et des changements.
Ils nous confient que la maladie, les traitements (chirurgie, chimiothérapie, hormonothérapie) et leurs séquelles, la douleur, la fatigue, les modifications physiques (perte de poids, prise de poids, amputations, cicatrices…) viennent perturber l’image de leur corps et la force de leur confiance en eux.
Ils évoquent le traumatisme psychologique ; ils décrivent leur corps balafré de stigmates visibles ou non (alopécie, mammectomie, hystérectomie, prostatectomie, trachéotomie, colostomie, sondes) avec leur corollaires d’odeurs, de plaies et d’écoulements qui bouleversent leur intimité.
Comment dire et montrer ce corps à son/sa partenaire ?
Comment vivre son regard ?
Comment recevoir la surprise de l’autre ?
Le temps d’accompagnement est un temps fort en expression. On y échange des émotions, des informations concrètes, des histoires de soi, des histoires de vie et de famille. Pour le patient, l’enjeu est de mettre du sens dans ce chaos. C’est un temps où l’infirmière et le patient inventent des chemins à travers l’écoute, la parole, le soutien et la confiance.
Leurs questions :
Concrètement, comment vivre le plus normalement possible quand « c’est plus comme avant » ?
Comment parler de sexualité alors que le cancer projette l’ombre de l’incertitude et de la mort ?
Comment parler de la sexualité alors que c’est souvent un sujet intouchable et tabou et qu’il relie à la honte, la pudeur, la timidité, l’éducation, la religion, la culture ? Tout est à prendre en compte.
Comment parler de la sexualité, les rivages les plus intimes de soi alors que c’est déjà si difficile de parler de son quotidien ?
Comment se reconnaître dans son corps quand il est méconnaissable ?
Comment laisser l’autre toucher sa peau lorsque sa propre main répugne à effleurer ?
Comment éprouver du plaisir lorsque son corps n’est que douleur ?
C’est à nous les infirmières, par notre attitude d’ouverture, de faciliter la parole mais aussi d’accueillir la gêne et le silence.
A la consultation infirmière, ma première aspiration est de mettre la personne en confiance. Je lui consacre au cours de l’entretien un recueil de données avec identification, repérage des besoins perturbés et les ressources de la personne. J’aborde la sexualité comme un besoin normal comme celui de respirer ou de manger. Cela n’est pas vécu de façon intrusive si on la présente comme « une porte entre-ouverte ». La personne se saisit de cette invitation ou non.
Mais généralement si l’infirmière est à l’aise, naturelle sur le sujet, le patient a accès au niveau de confiance propice aux confidences.
J’apporte des informations en lien avec le besoin perturbé ou risquant d’être perturbé, comme je peux aussi prodiguer des conseils en lien avec les effets secondaires des traitements.
« Le traitement par hormonothérapie peut provoquer une sècheresse vaginale. Si des rapports sexuels sont douloureux pour vous, n’hésitez pas à utiliser des ovules pour humidifier le vagin. Il se peut que vous éprouviez un moindre désir à faire l’amour. » Je l’invite à créer un climat intime propice à l’éveil des sens, à la séduction et aux gestes tendres, aux retrouvailles amoureuses.
Le fait parfois d’aborder sous un angle informatif les répercussions des traitements sur la vie sexuelle, cela permet à certains patients gênés ou réservés de se sentir plus libres d’en parler.
« Si vous avez du mal à regarder la cicatrice, vous pouvez peut-être commencer par la toucher, en faisant des petites massages pour assouplir la peau. »
L’appropriation viendra progressivement par le toucher. « Si vous êtes gênée de paraître complètement nue pendant que vous faites l’amour, je vous suggère de mettre un haut agréable, de jouer sur la lumière. »
Il faut se défaire de nos représentations : j’ai été très étonnée de l’ardeur sexuelle d’un couple âgé de plus de 80 ans. Célibataire seul, en couple, hétérosexuel, homosexuel, handicapé, personne âgée, croyant pratiquant, malade psychiatrique, la sexualité doit être abordée. Je m’adresse simplement à la personne dans son identité humaine.
Toujours avec délicatesse mais simplicité, parfois avec de l’humour, de la légèreté, ou gravité et sérieux selon comment la personne en face l’y aborde.
Nous ne connaissons pas la place de la sexualité de la personne avant la maladie ou sa relation de couple. Lorsque je reçois en entretien un couple, le moment du recueil de données se fait seul avec le patient.
Mais généralement si l’infirmière est à l’aise, naturelle sur le sujet, le patient a accès au niveau de confiance propice aux confidences.
J’apporte des informations en lien avec le besoin perturbé ou risquant d’être perturbé, comme je peux aussi prodiguer des conseils en lien avec les effets secondaires des traitements.
« Le traitement par hormonothérapie peut provoquer une sècheresse vaginale. Si des rapports sexuels sont douloureux pour vous, n’hésitez pas à utiliser des ovules pour humidifier le vagin. Il se peut que vous éprouviez un moindre désir à faire l’amour. » Je l’invite à créer un climat intime propice à l’éveil des sens, à la séduction et aux gestes tendres, aux retrouvailles amoureuses.
Le fait parfois d’aborder sous un angle informatif les répercussions des traitements sur la vie sexuelle, cela permet à certains patients gênés ou réservés de se sentir plus libres d’en parler.
« Si vous avez du mal à regarder la cicatrice, vous pouvez peut-être commencer par la toucher, en faisant des petites massages pour assouplir la peau. »
L’appropriation viendra progressivement par le toucher. « Si vous êtes gênée de paraître complètement nue pendant que vous faites l’amour, je vous suggère de mettre un haut agréable, de jouer sur la lumière. »
Il faut se défaire de nos représentations : j’ai été très étonnée de l’ardeur sexuelle d’un couple âgé de plus de 80 ans. Célibataire seul, en couple, hétérosexuel, homosexuel, handicapé, personne âgée, croyant pratiquant, malade psychiatrique, la sexualité doit être abordée. Je m’adresse simplement à la personne dans son identité humaine.
Toujours avec délicatesse mais simplicité, parfois avec de l’humour, de la légèreté, ou gravité et sérieux selon comment la personne en face l’y aborde.
Nous ne connaissons pas la place de la sexualité de la personne avant la maladie ou sa relation de couple. Lorsque je reçois en entretien un couple, le moment du recueil de données se fait seul avec le patient.
Lorsque le couple éprouve des difficultés à communiquer entre eux, la consultation infirmière permet parfois à certains époux de verbaliser leurs émotions, leurs ressentis sur la modification physique de leur conjoint. Dans le cas de femmes prises en charge, les hommes disent leur désarroi, leur sentiment d’impuissance, leur maladresse. Parfois, ils ne savent pas comment aider leur épouse dans cette épreuve. Cet aveu verbalisé est une étape sur le chemin de leur travail d’élaboration et d’adaptation de leur vie de couple.
Face à la perte de l’estime de soi de leur partenaire, le conjoint peut rassurer.
La parole ou l’émotion vient signifier à l’autre son affection, son amour, son attachement. La parole peut restaurer cette perte de confiance en soi.
Mais il m’est arrivé d’être confrontée aux situations de tension au sein du couple où ce sont des reproches qui sont formulés. Toutefois, cette mise en paroles déposée permet d’amorcer une réflexion sur leur relation. La sexualité n’est pas abordée de façon directe mais à travers ce que les événements de la traversée de vie ont pu en révéler.
Parfois les hommes et les femmes arrivant au service viennent seul. La simple question « vous êtes venus seul(e) ? » révèle dans les diverses réponses des fonctionnements de couple ou des situations de conjugopathie installées.
L’importance d’une équipe soignante multidisciplinaire
Nous orientons les patients vers nos collègues des soins de support (psychologue, assistante sociale, diététicienne, IDE, stomatothérapeute, etc.) en fonction des besoins perturbés observés et toujours avec son accord.
Face à la perte de l’estime de soi de leur partenaire, le conjoint peut rassurer.
La parole ou l’émotion vient signifier à l’autre son affection, son amour, son attachement. La parole peut restaurer cette perte de confiance en soi.
Mais il m’est arrivé d’être confrontée aux situations de tension au sein du couple où ce sont des reproches qui sont formulés. Toutefois, cette mise en paroles déposée permet d’amorcer une réflexion sur leur relation. La sexualité n’est pas abordée de façon directe mais à travers ce que les événements de la traversée de vie ont pu en révéler.
Parfois les hommes et les femmes arrivant au service viennent seul. La simple question « vous êtes venus seul(e) ? » révèle dans les diverses réponses des fonctionnements de couple ou des situations de conjugopathie installées.
L’importance d’une équipe soignante multidisciplinaire
Nous orientons les patients vers nos collègues des soins de support (psychologue, assistante sociale, diététicienne, IDE, stomatothérapeute, etc.) en fonction des besoins perturbés observés et toujours avec son accord.
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Dossier : Cancer et sexualité
« Comment accompagner le patient dans sa sphère intime ? » ; « Quelle place donner à la sexualité à l’hôpital ? » Aujourd’hui encore, deux tabous en conflit cohabitent et nous troublent : Eros, le principe de vie, la sexualité, et Thanatos, le principe de mort, la maladie. Le toucher, le regard sont convoqués et le soignant se laisse affecter par l’érotique de son soin. La question de la santé sexuelle individuelle ou conjugale doit pouvoir être abordée avec les patients lors de rencontres d’écoute fondées sur un rapport de confiance. Les secteurs spécialisés en oncologie, en maladies chroniques ou en soins palliatifs, sont confrontés à l’éveil, aux questions des enfants, des adolescents et des parents sur la sexualité…
Rédactrice invitée chargée du dossier : Christiane VIAL
“Penser l’érotique du soin“ Christian Gallopin
“Dépasser nos limites pour mieux accompagner“ Christiane Vial et Albert Barbaro
“La santé sexuelle en oncologie. Formation pour les soignants“ Lysiane Pelleger
“Le plaisir et sa place dans le projet personnalisé de soins (PPS)“ Isabelle Blin
“La place de la sexualité en cancérologie“ Camille Labille-Som
“L’adolescent, le cancer et la sexualité“ Cicek Oya Sakiroglu
Autres sujets :
“Les remaniements psychiques de l’homme souffrant de troubles érectiles“ Dominique Lefèvre
“Approche EMDR dans le traitement des troubles conjugaux de la sexualité“ Lionel Souche
“La prévention des abus sexuels chez les 6-8 ans“ Adélaïde Jaffeux
“Forum internet sur la sexualité : un préalable à la consultation de sexologie ?“ Lenaig Serazin-Orsini
“Le bazar du genre“ Dominique Deraita
“Une rupture amoureuse à 13 ans“ Catherine Leboullenger
“Cinéma : un délire à deux… vu comme une MST“ Jean-Gérald Veyrat. Le désir est le point de départ de l’acte sexuel. C’est le stade qui précède et accompagne la montée de l’excitation et qui en détermine l’intensité, la durée, la pente. Bien que la baisse du désir sexuel affecte surtout les femmes, elle touche aussi la population masculine où elle devient même actuellement un motif fréquent de consultation. Ce trouble peut être dû à des facteurs somatiques, psychologiques individuels, relationnels, interpersonnels ou encore concernant la constellation familiale et le contexte socioculturel.
« Comment accompagner le patient dans sa sphère intime ? » ; « Quelle place donner à la sexualité à l’hôpital ? » Aujourd’hui encore, deux tabous en conflit cohabitent et nous troublent : Eros, le principe de vie, la sexualité, et Thanatos, le principe de mort, la maladie. Le toucher, le regard sont convoqués et le soignant se laisse affecter par l’érotique de son soin. La question de la santé sexuelle individuelle ou conjugale doit pouvoir être abordée avec les patients lors de rencontres d’écoute fondées sur un rapport de confiance. Les secteurs spécialisés en oncologie, en maladies chroniques ou en soins palliatifs, sont confrontés à l’éveil, aux questions des enfants, des adolescents et des parents sur la sexualité…
Rédactrice invitée chargée du dossier : Christiane VIAL
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“Cinéma : un délire à deux… vu comme une MST“ Jean-Gérald Veyrat. Le désir est le point de départ de l’acte sexuel. C’est le stade qui précède et accompagne la montée de l’excitation et qui en détermine l’intensité, la durée, la pente. Bien que la baisse du désir sexuel affecte surtout les femmes, elle touche aussi la population masculine où elle devient même actuellement un motif fréquent de consultation. Ce trouble peut être dû à des facteurs somatiques, psychologiques individuels, relationnels, interpersonnels ou encore concernant la constellation familiale et le contexte socioculturel.